Le Siècle des Lumières a pris la mesure de tout dans une gigantesque observation du monde. Il fallait classer le savoir, prendre les mesure du temps qui passe, celles de la lumière et de sa vitesse de propagation, celles du son et de ses ondes, il fallait faire l’inventaire, répertorier le monde, l’inventorier pour pouvoir mettre des étiquettes.
On a perfectionné et multiplié les pendules, créé des instruments de mesure, confectionné des poids, prélevé des échantillons de toutes les plantes, de tous les brins d’herbe de la nature pendant cette période où l’homme voulait tout découvrir.
Combien de fois me suis-je surprise à vouloir remettre de l’ordre, classer, inventorier ce que j’étais, et à vouloir comprendre tout ce qui m’entourait ? Combien de fois ai-je été emmurée dans cette envie de savoir et d’ordre, ce besoin d’entière clarté, de pleine lumière, refusant les ombres dans la nécessité de me situer dans l’univers, pour connaître qui j’étais?
Combien de temps me suis-je ainsi fourvoyée à la recherche de certitudes éprouvées sur des chemins balisés ?
Mais aujourd’hui lorsque depuis ma fenêtre je vois le ciel de nuit et les étoiles et que, dans cette pénombre, j’écoute les rumeurs qui viennent de la ville, l’enfant des lumières que j’étais explore sa part d’ombre et s’enfonce avec délectation dans l’obscurité et le mystère. Très loin des pendules et des instruments de mesure.